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Sentences
19 décembre 2005

Mieux connaître l'Aïd el Kebir (fête musulmane)

J’irai donc vers les enfants d’Israël, et je leur dirai :
-Le Dieu de vos pères m’envoie vers vous. Mais, s’ils me demandent quel est Son nom, que leur répondrai-je ?
Dieu dit à Moïse :
-Je suis celui qui suis.
De ces dernières paroles, que retirons-nous ?
L’Eternel n’a pas prononcé de nom, Il ne s’en est pas attribué.
Plus tard, quand les prophètes ont propagé Sa parole, ils L’ont désigné par des noms, suivant leur langue, suivant leur pensée, suivant leur foi.
Quand nous prions, que nous adressons à Lui, nous Le tutoyons, nous Le vouvoyons, nous Lui faisons des remarques, nous Lui formulons des plaintes, Il est, nous, en nous.
Il n’y a qu’Un Dieu.
Pourquoi tant de haine en Son nom ?
Pourquoi tant de malheurs, pour se faire valoir à Ses yeux ?
Croyez-vous qu’Il éprouve du plaisir en voyant Ses filles et Ses fils d’entre-déchirer ?
Pensez-vous qu’Il n’a pas la même peine qu’un père, qui constate que sa famille est en train de se disloquer ?
Dieu nous a créés pour nous aimer, pour nous unir.
La religion, qui est la notre, nous a été inculquée par nos parents, qui l’ont reçue des leurs.
Un enfant circoncis, l’a été sans que l’on lui demande son avis, il est devenu ce qu’il est par la volonté de ses parents et non par ses convictions propres.
Moi, je me tue à le dire, qu’il n’y a aucune différence entre les hommes, il y a des bons et des mauvais partout.
Nous n’avons pas le droit de tout mélanger, sous prétexte que l’un d’eux nous a trompés.
Bonne fête à tous les musulmans du monde, et en particulier à ceux qui n’ont pas encore trouvé le chemin de Dieu.

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Aid el Kebir

De l'arabe, La Grande Fête. Aussi appelée Aid el Adha ou la fête du mouton.

L'Aid el Kebir est la fête musulmane qui commémore le sacrifice d'Abraham. Pour les musulmans, Abraham devait sacrifier son fils (Ismael pour les musulmans) comme Dieu le lui avait ordonné. Mais au moment d'exécuter son geste, Dieu intervint et lui ordonna de sacrifier à la place un bélier. Cette fête a lieu à la fin du pélerinage à La Mecque.

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L'Aïd-El-Kebir, la fête du mouton !

La fête de l'Aïd Al-Kebir a lieu le 7 du mois Dhou-l-Hijja, le 12ème mois lunaire, qui est également le mois du pélerinage à la Mecque. L'Aïd-El-Kebir, ou "grande fête", commémore l'histoire bien connue du sacrifice d'Abraham. Cette histoire, que l'on trouve dans l'Ancien Testament, raconte que Dieu, pour éprouver la foi d'Abraham, lui demanda de sacrifier son jeune fils unique. Abraham, la mort dans l'âme, allait obéir et égorger son fils, lorsque Dieu arrêta sa main et, pour le remercier de sa loyauté et de son obéissance, lui demanda de sacrifier plutôt un mouton à la place. C'est donc en souvenir de ce sacrifice que les musulmans ont coutume d'égorger un mouton le jour de l'Aïd-El-Kebir.
En dehors de cette coutume, c'est également un jour de réjouissances où l'on festoie en famille.

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Aïd el-Kebir

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Cet article fait partie de la série
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L'aïd el-Kebir (signifiant littéralement la grande fête) est l'une des fêtes musulmanes les plus importantes. Également appelée Id al-Adha, elle marque chaque année la fin du pèlerinage à La Mecque et à lieu le 10 du mois de Dhou al Hidjia, dernier mois du calendrier musulman.

Cette fête commémore la soumission d'Abraham à Allah, lorsque le patriarche était prêt à sacrifier son fils Ismaël sur son ordre.

Chaque famille, dans la mesure de ses moyens immole un mouton en l'égorgeant couché sur le flanc gauche et la tête tournée vers La Mecque.

Dans une partie de l'Afrique musulmane, dont le Mali, le Sénégal, le Niger et le Burkina Faso, l'aïd el-Kebir est nommé la tabaski.

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Une leçon philosophique d'Alain sur l'Aïd el Kebir

Propos du 13 avril 1923 (Propos sur les pouvoirs, p. 98).

Un discours de la brebis adressé à son fils l'agneau, l'invitant à l'obéissance, soutenu par d'excellentes raisons, est encadré de deux paragraphes d'un cynisme peu commun, qui en déterminent la portée avec une extrême précision. La vie d'un mouton, pour son plus grand bien, est dirigée par le berger. Celui-ci sait ce qui est utile à son troupeau, ce qui lui est profitable ; il le gouverne avec plus de jugement que les moutons ne pourraient le faire eux-mêmes. Il est un Dieu pour eux. A ceci près cependant qu'il les mène pour finir se faire égorger à l'abattoir. Ceci est sans doute une histoire vraie, trop cruelle pour être racontée aux petits-enfants, qui aiment tendrement les agneaux et désirent les serrer sur leur cœur. Mais enfin les petits-enfants un jour deviennent grands et prennent goût à la viande d'agneau, particulièrement délectable les jours de fête. Ils doivent alors ouvrir les yeux sur la destinée de ces aimables mammifères et sur leur passage obligé par l'abattoir, " chose prompte, séparée, et qui ne change point les sentiments " ! Ce Propos n'est pas l’expression d’un militantisme végétarien, qui viserait à faire abandonner au lecteur la consommation de chair animale : c'est une fable à la manière de l'excellent La Fontaine, voire une allégorie à la manière de Platon.

Sans doute un fabuliste met-il en garde son lecteur en plaçant en tête ou en queue de son récit ce que les instituteurs appellent une moralité, qui en délivre un sens propre à éclairer la conduite des lecteurs. Il n'y a rien de semblable ici. Pour cette raison on peut être tenté de rapprocher le Propos du mythe platonicien, tel qu'il se rencontre par exemple au milieu de Phèdre ou à la fin de la République. En effet ces textes célèbres, celui de l'attelage ailé comme celui du retour d'Er du royaume des morts, ont ceci de remarquable que leur traduction est laissée tout entière à la responsabilité et même à l'initiative du lecteur, qui pourrait d'abord ne pas comprendre qu'il y a lieu de les interpréter. Si l’occasion lui est effectivement donnée ici de le faire, il n'en demeure pas moins que l'intention de l'auteur est transparente, et évidente la possibilité comme dans le Loup et l'agneau (Fables, I, 10), de transposer chaque terme du récit dans un autre, dont il est en quelque sorte le symbole. C'est pourquoi cette histoire relève davantage de l'allégorie. Nul amateur de philosophie politique ne peut d'ailleurs ignorer que depuis des millénaires le couple berger et moutons constitue un lourd symbole politique. L'interpellation de Thrasymaque en a clairement déterminé le sens : " tu t'imagines que les bergers ont en vue le bien de leurs moutons, et qu'il les engraissent et qu'ils les soignent dans une autre vue que l'intérêt de leur maître et du leur propre. De même tu t'imagines que ceux qui gouvernent dans les Etats ont à l'égard de leurs subordonnés d'autres sentiments que ceux qu'on peut avoir pour des moutons " (République, 343b). L'interlocuteur de Socrate pourtant, si méprisant qu'il soit, n'ose pas aller jusqu'au bout de sa logique et se contente pudiquement d'évoquer une exploitation limitée à la tonte. Il évoque pas la fin bien plus lamentable du gouverné.

Le lecteur douillettement installé dans l'Europe occidentale du début du XXIe siècle, a peut-être perdu de vue la totale abjection des gouvernants, qui envoient leurs peuples respectifs se massacrer réciproquement sur les champs de bataille. Sans doute ceux qui déclarent la guerre le 2 août 1914 ne devinent-ils pas à ce moment-là qu'elle va durer près de cinq ans, que les morts se compteront par millions, que les mutilations seront atroces et les destructions apocalyptiques. Peut-être croient-ils vraiment que la guerre sera achevée avant l'hiver, qu'en trois semaines ils seront à Berlin ou à Paris, selon le cas. Mais si cela est vrai, cela ne peut que faire douter de leur capacité de gouverner, sans affaiblir en rien cependant le jugement qui les condamne, parce qu'il est par principe abominable de faire usage de la violence contre les peuples. Les peuples payent pour des intérêts qui ne sont pas les leurs.

Alain est né en 1868, il avait donc 46 ans en 1914 et n'était pas mobilisable. Dans les mois qui ont précédé le premier conflit mondial il a fait tout ce qui était en son pouvoir pour en éviter le déclenchement ; il a été un militant de la paix. Il écrivait le 15 juin 1913 au sujet des initiatives des gouvernants français et en particulier de l’allongement à trois ans de la durée du service militaire : " cette politique conduit tout droit à la guerre, non sans d'énormes risques. Quel est le Français raisonnable qui risquerait notre patrimoine à ce jeu de hasard ? Aussi n'est-ce pas ainsi qu'ils pensent. Ils se laissent aller ". Plus d'un an à l’avance il mettait en garde contre la pente facile qui risquait de mener les peuples à la guerre. Le 30 novembre de la même année, dans la perspective de prochaines élections législatives, plus énergiquement il proposait aux partis politiques de gauche une autre voie : " il faut opposer une politique résolument pacifique à une politique résolument guerrière (...) Il faut montrer à l'électeur que le rôle d'un gouvernement selon l'esprit radical, c'est justement d'annuler la puissance des provocateurs et de calmer les passions ". Et inlassablement jusqu'au 31 juillet 1914 il analysait lucidement ce que serait le conflit : " le massacre des meilleurs ; j'y insiste. Considérez tout à nu cet effet de la guerre, et même de la victoire. L'honneur est sauf, mais les plus honorables sont morts. Toute la générosité est bue par la terre (...) La guerre n'est plus une épreuve pour les héros, mais un massacre des héros. On fait la guerre pour être digne de la paix ; mais les plus digne n'y sont plus quand on fait la paix (...) Bref, dans toute guerre, la justice est assurément vaincue ; l'injustice rit en dedans. Je voudrais que les ombres des héros reviennent, et qu'ils admirent cette paix honorable qu'ils auront achetée de leur vie ". Ayant vainement résisté au bellicisme, va-t-il se planquer ? Le 2 août il se présente au recrutement et s'engage. Le 23 août il choisit l'artillerie lourde. D'octobre 1914 à octobre 1917 l'ex-professeur de la khâgne d'Henri IV, devenu le deuxième classe Chartier, sera téléphoniste dans les batteries de 95. Il fera courir les fils dans les tranchées. Il sera le lien entre les postes : " Chartier écoute... " Je n'en dirai pas plus de sa vie et de son expérience dans les tranchées : agneau parmi les agneaux, il bénéficiait d'une première loge sur le spectacle de la dernière heure de l'agneau. Celui qui l'avait vue venir de loin ne pouvait pas s'en désolidariser ; il le pouvait d'autant moins que dès les premières semaines en Argonne, sur la Marne, en Belgique ses élèves, " les meilleurs " incontestablement, étaient fauchés en nombre.

Il faut maintenant comprendre le discours de l'obéissance. A la fois il faut des chefs au peuple et il ne faut pas que le peuple les aime ni les respecte. Les respecter et les aimer, c'est prendre le chemin de l'abattoir. Mais n'avoir pas de chefs, ou leur désobéir, c'est aller contre le bien public. S'il est normal et juste que le peuple vaque à ses affaires, c'est-à-dire qu'il travaille à se procurer la subsistance dont il a besoin, en allant au bureau, à l'usine, etc. où il est effectivement mal placé pour juger du bien public, il est nécessaire aussi par conséquent qu'il délègue à quelques-uns la tâche d'examiner les affaires publiques et d'y décider ce qui est bon pour tous. Il y aurait de l'incohérence à ne pas se soumettre à leur décision. Il faut donc que les hommes se pressent derrière leur chef et que lui marche devant. Dans la mesure où il sait ce qu'eux-mêmes ne savent pas, où il décide pour leur bien, il peut leur apparaître comme un être d'une essence supérieure, c'est-à-dire comme un dieu. Il les garde du loup et aussi, et d’ailleurs plus souvent que du loup, il les garde du mouton noir.

Qui est ce dernier ? sinon celui au discours duquel la brebis oppose son prêche, c’est à dire le fauteur de désordre, l'anarchiste, le séditieux qui exhorte les bons petits agneaux à la désobéissance. Il ressemble à ce personnage de La Fontaine, d'une espèce autre certes mais voisine, dont le bref et vigoureux discours s'achève par ces mots : " notre ennemi, c'est notre maître : je vous le dis en bon françois " (le Vieillard et l'âne, Fables, VI, 8). L'auteur a beau mettre une minuscule à l'initiale de françois, ces vers, les deux derniers de la fable et donc sa moralité, sonnent aussi bien comme l'avertissement donné à ses concitoyens par celui qui n'a jamais été très bien en cour. Il parle clair sans doute, mais il parle aussi en politique s'adressant au peuple dont il est membre, afin de le mettre en garde contre celui qui le gouverne. Il est le mauvais esprit, certains voudraient dire le Malin, qui travaille à miner et à ruiner dans la conscience des autres les principes du civisme. Il est le révolutionnaire qui fait entrave à la collaboration des classes, le peuple avec ses dirigeants tous unis vers un but prétendu commun, qui n'est en fait que l'intérêt de la classe dirigeante. Il souffle sur les braises, il veut ranimer la lutte des classes, il explique que l'ennemi du mouton, loin d'être le loup est le berger lui-même. Il n'a certes pas tort ; mais il serait pourtant catastrophique de céder à ses sollicitations.

Le prêche de la brebis est fort bien composé. Elle rappelle premièrement à son fils ce qu'il doit au berger relativement à sa subsistance. La première fonction de l'Etat et du gouvernement est de veiller à ce que toute la population trouve la nourriture dont elle a besoin. Sans une organisation collective chacun serait réduit à se procurer par ses seules forces et d'abord à trouver par sa seule intelligence les éléments qui peuvent lui convenir en quantité et en qualité. De manière sous-jacente est évoqué ici l'état de nature, dans lequel assurément chacun est libre, mais libre avant tout de crever de faim. Il est voué à crever de faim d'abord parce que les hasards défavorables, qui ne manqueront pas, lui seront fatals ; mais aussi parce que ce que le hasard n'aura pas fait, la nécessité des heurts hostiles avec les autres le fera. On peut bien être le plus fort quelquefois, mais non pas toujours, comme l'a dit tranquillement Rousseau dans son Contrat social (Livre Ier, chapitre 3). Dans le domaine de l'alimentation, on voit très bien ce que le berger apporte aux moutons. Mais c'est vrai également dans celui de l'abri : il faut se garder tant de l'ardeur des rayons du soleil que de la froidure et de l'humidité de la pluie ; dans ce domaine également à défaut d'une organisation collective règne une concurrence, qui sera forcément fatale au plus faible. Etre suffisamment pourvu du logement et du vêtement grâce auxquels sont minimisés les effets des intempéries est aussi une raison d'être de l'Etat.

La mère enseigne ensuite à son fils ce qu'il doit au berger relativement à sa sécurité. Elle use d’une métaphore traditionnelle parmi les Grecs depuis l'Antiquité la plus reculée. On la trouve chez Homère qui désigne souvent Agamemnon comme " le pasteur des peuples ". Elle est en outre largement répandue dans le bassin méditerranéen, puisqu'on la retrouve dans la bouche de Jésus, qui est " le bon pasteur ", celui qui veille si attentivement sur son troupeau qu'il prend un soin particulier de la moindre de ses brebis (Luc, XV, 4-7). Dans les termes de cette image l'homme qui exerce une fonction de commandement politique, militaire ou religieux est le berger de son peuple. Or le pasteur est celui qui veille sur chaque animal de son troupeau et pas seulement sur le troupeau pris globalement, celui qui plante là quatre-vingt-dix-neuf brebis qui sont dans le droit chemin, pour ramener la centième qui s'est égarée. Sa déontologie ne l'autorise pas à perdre un seul élément du troupeau ; il est et se sent comptable de chaque tête. Ce n'est que sous condition que son rôle soit bien ainsi entendu que la métaphore est rassurante et que le peuple peut avoir confiance en ses dirigeants. Si le peuple devait croire au contraire que l'éthique professionnelle de ses chefs leur autorise un certain pourcentage de pertes, il ne leur accorderait plus sa confiance. De même que le berger va patiemment chercher la brebis égarée, qu'il soigne attentivement celle qui est malade, le gouvernement multiplie les efforts pour retrouver l'homme perdu en mer ou en montagne, pour fournir en soins et en médicaments celui qui est exposé aux attaques d'un mal quelconque. Dans ce domaine encore les hommes n'ont qu'à se féliciter de n'avoir pas que leurs seules forces pour faire face à leurs difficultés.

Mais les problèmes ne viennent pas que de la nature des choses, ils tiennent aussi à la rivalité des différents groupes humains. Car si l'état civil met fin à la concurrence des hommes entre eux à l'intérieur du groupe, il ne remédie évidemment pas à la concurrence entre ces derniers. C'est pourquoi la brebis évoque troisièmement la guerre contre les loups. Un Etat en agresse un autre, il cherche à s'emparer de tout ou partie de son territoire, de ses richesses naturelles comme les troupeaux, les mines ou les plantations, voire d'une fraction de sa population pour la faire travailler à son service. Invasion, annexion, et esclavage, confiscation, destruction et massacre, tels sont les actes qu'il faut redouter des loups. Plaute (254-184) le premier, semble-t-il, avait averti : " homo homini lupus " et au dix-septième siècle Hobbes avait repris la formule à son compte. Les peuples ont tout à redouter de la convoitise de leurs voisins. L'un des rôles évidents de l'Etat est de faire face aux actes hostiles par lesquels ceux qui sont au-delà de la frontière viendraient agresser ceux qui sont en deçà. Le chef doit non seulement répondre à ces événements, y apporter la solution convenable, mais il doit aussi les prévoir et autant que possible les prévenir. Il doit donc mener contre l'étranger une politique active, usant de moyens diplomatiques et de moyens militaires pour contenir et repousser l'invasion, pour punir ses auteurs, leur ôter l'envie de recommencer et mieux encore pour l'empêcher. Les cinq têtes de loups clouées aux portes de l'étable constituent à la fois une démonstration de l'efficacité de la défense et un moyen psychologique de terroriser les attaquants potentiels. Sans Etat et sans gouvernants les moutons seraient réduits à être dévorés par les loups et les peuples les plus faibles réduits à être asservis ou exterminés par les plus forts.

De ce premier ensemble d'arguments la brebis tire une conclusion politique. " Nous sommes ses membres et sa chair. Il est notre force et notre bien ". Car la conséquence qu'il convient de tirer des réflexions précédentes n'est rien de moins que la supériorité du gouvernant sur le gouverné : le chef sait ce que le troupeau ne sait pas et le chef peut ce que le troupeau ne peut pas. Il est la providence de son peuple, un dieu pour lui. Or le rapport entre l'un et l'autre peut aisément être imagé, illustré par le modèle du corps humain, dans lequel la tête est la providence du corps. Ce n'est pas le corps qui sait ce qui est bon pour lui ; ce n'est pas le corps qui calcule les moyen de sa sauvegarde ; ce n'est pas le corps qui coordonne les mouvements de son action. Si l'association des hommes les uns aux autres dans un état civil constitue un ensemble nouveau, on trouve dans celui-ci non seulement des organes mutuellement dépendants, mais plus précisément des organes soumis à un autre, auquel seul reviennent la pensée pour le bien de tous et la volonté pour le bien de tous. Il y a dans le corps politique des membres et une chair, qui ne sont pas faits pour penser ni pour vouloir, mais seulement pour exécuter ce que pense et veut la tête. Sur le plan politique il n'y a pas d'égalité entre les gouvernants et les gouvernés ; ils sont deux sortes d'hommes aussi différentes l'une de l'autre que les bergers et les moutons. Tel est bien le discours spontané des chefs, qui reçoit ici un écho dans les bêlements de la brebis.

Mais son sermon ne s'arrête pas sur ce terrain politique, il se poursuit sur un autre, celui de l'éthique. Car elle connaît bien les tentations auxquelles est inévitablement soumis un agneau. Quand bien même il n'ignore pas qu'il doit obéir aux maîtres, un homme quelconque, et pas seulement un enfant, risque toujours de céder au désir de s'emparer d'un bien attrayant que le partage ne lui a pas attribué, qu'il n'a d'ailleurs peut-être attribué à personne et qui peut simplement se trouver en dehors de ce qui est politiquement déterminé comme légitime. Il peut sembler bien innocent à un homme mûr, je ne dis pas blet, de céder au désir de séduire une jeune fille de 17 ans, " une touffe fleurie ", et de se livrer avec elle au " plaisir d'une gambade ". Mais, " mon fils agneau ", tu ne dois pas transgresser l'interdit. " Un savant mouton ", quelque peu théologien éventuellement, a enseigné que le désir était diabolique et qu'il fallait y résister. La dignité de l'homme, celle qui le situe au-dessus de l'animal, exige qu'il ne se laisse pas gouverner par ses membres, fût-ce le membre sexuel, et qu'en lui ce soit la tête qui commande. L'oratrice à peut-être une lointaine connaissance de ce passage de la République, où est expliqué qu'un homme est formé d'une seule peau, vaste enveloppe dans laquelle sont contraints de cohabiter un homme proprement dit avec un lion mais aussi un monstre polycéphale (588b-590a). Il n'y a d'homme véritable qu'à la condition que dans la peau un ordre s'établisse par lequel l'homme commande au polycéphale, ce qui ne se peut qu'avec le concours du lion. Sans entrer dans les détails on peut dire qu'il n'y a pas d'homme éthiquement libre s'il se laisse dicter sa loi par ce qui n'est bon que pour un de ses organes. Le gourmand, qui prend pour loi celle que lui dicte son estomac, le libidineux, qui prend pour loi celle que lui dicte son sexe, etc. ne sont pas libres mais esclaves de leurs désirs. La liberté ne consiste pas à faire ce qui peut combler tel ou tel organe, mais ce qui est bon pour le corps tout entier, que seule la tête est capable de déterminer.

Ce petit couplet éthique n'était destiné qu'à mieux faire entendre le refrain politique. Pas plus que dans l'être individuel il n'est bon que les organes aillent chacun leur chemin, dans l'être collectif il n'est bon que les hommes désobéissent au chef. La comparaison classique depuis des siècles, et même depuis des millénaires, si l'on songe que son origine est dans la République de Platon, qui fait du corps humain le modèle d'un prétendu corps social, la conduit à cette exhortation : " sois donc au troupeau comme ta jambe est à toi ". C'est ce discours bien connu de tous, mille fois entendu, qui est qualifié de : " génie propre au vrai mouton " ! Cela donne à penser. L'idée d'une Cité qui montrerait en grand ce qui n'est décelable qu'en petit dans le corps humain, l'idée d'un " corps social " (Rousseau), l'idée d'un " grand Etre " (Comte), prémisse et postulat de la réflexion politique de nombreux philosophes, de la totalité des sociologues de Durkheim à nos jours, peut bien être spéculativement féconde, mais incontestablement elle est éthiquement et politiquement dangereuse dans l'exacte mesure où elle est moutonnière. La philosophie politique d'Alain a ceci d'original qu'elle en appelle à la souveraine pensée de chacun ; elle refuse obstinément de remettre la pensée au chef. Il faut bien que le chef commande, mais cela n'implique nullement que le gouverné se démette de son jugement. Il faut bien que le gouverné obéisse, mais cela n'implique nullement qu'il voue à son chef quel sentiment que ce soit qui approcherait de l'amour, de la vénération, et encore moins de l'adoration qui lui feraient perdre la liberté de la pensée et de la parole. Telle est la politique du mouton noir. Il est juste de dire d'ailleurs que dans cette voie la philosophie d'Alain n'est pas sans précédents. Rousseau, même s'il parle d'un corps social, distingue précieusement le gouvernement de l'Etat, n'accordant au premier que la fonction d'exécuter les décisions du souverain, et ne reconnaît d'autre souverain que le peuple lui-même (Contrat social, Livres II et III). On ne saurait donc s'appuyer sur cet auteur pour accorder une ombre de légitimité au sermon de la brebis. Mais plus sûrement encore qu'elle est dans la lignée de Rousseau, la politique d'Alain se situe dans celle de Spinoza. Car nul plus clairement que celui-ci, ni plus vigoureusement, n'a exprimé l'impossibilité pour le citoyen de renoncer à la liberté de sa parole, car elle n'est pas seulement tolérable par l'Etat, mais elle est indispensable à sa propre liberté (Traité théologico-politique, chapitre XVI). Les détenteurs du pouvoir ne sont que des hommes, nullement des dieux, et en tant que tels ils sont sujets aux passions. Le citoyen doit donc premièrement se défier d'eux, et deuxièmement les rappeler à l'ordre. Il doit obéir, assurément, mais non se taire.


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Commentaires
K
je suis entrer dans se blog car j'ai une recherche je suis tunisienne et je suis dacor
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