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Sentences
8 février 2006

Le mystère d'Israël

source: Des reflexions d'Henri Lefêvre sur un enseignement d'Alain Schwartz


BÉNI SOIT LE DIEU D'ISRAEL

Depuis des siècles, les chrétiens prononcent presque sans y penser cette formule: pourtant elle porte en elle-même une vérité fondamentale pour le Christianisme: notre foi chrétienne est bâtie sur la foi juive, en découle, et lui doit vie.
Le renouveau charismatique a été l'un des moteurs de la redécouverte de cette vérité essentielle et il semble bien que l'Esprit de Dieu accentue maintenant ce message qui avait commencé à retentir à la fin du siècle passé; il avait constitué l'une des surprises du Concile Vatican Il qui a produit à ce sujet la déclaration appelée NOSTRA AETATE, qui est la seule déclaration qui ne s'appuyait aucunement sur les conciles précédents comme c'est l'habitude, mais uniquement sur des textes bibliques 1 Ce qui illustre bien le tournant exceptionnel qui était ainsi vécu.
Depuis la découverte horrifiée de la Shoah, toutes les églises ont de la même façon, même si ce fut sous des formes diverses, reconnu que de nouvelles relations devaient désormais s'établir avec le judaïsme.
La Shoah fut certainement à l'origine de ce nouveau regard, mais il ne pouvait échapper à personne que cette tragédie n'avait pu être possible dans nos sociétés "chrétiennes", que par suite d'une longue tradition de rejet. La plus récente "Déclaration des Evêques de France" dite "déclaration de Drancy" a bien reconnu que le processus très ancien de rejet du judaïsme, processus qui avait connu des périodes noires de persécutions violentes ou larvées, avait sans doute préparé les esprits à l'apathie simplement attristée dans laquelle fut accueillie cette persécution , une de plus, mais combien terrifiante, qui fut mise en place par le pouvoir nazi.

Le peuple chrétien a ainsi été invité à une très sérieuse remise en question dans le regard qu'il porte sur le judaïsme, ayant à passer d'une opposition, d'un mépris, d'un rejet, ce qui fut la règle quasi générale pendant les 14 ou 19 siècles passés, à une approche respectueuse, à une écoute attentive, à une considération réelle, sentiments qui ont d'autant plus de raisons d'être affirmés qu'ils ont mis si longtemps à se manifester.,,

UN PEU D'HISTOIRE

Certains chrétiens n'ont aucune notion de l'histoire des relations entre l'Eglise et la Synagogue. Le rapport au peuple juif se limite pour eux aux considérations populaires sur le judaïsme, considérations très influencées par l'antisémitisme pcifen. Pour un peu, ils diraient que l'histoire du christianisme a commencé, voici 2000 ans, à peu près lorsque l'histoire du juddisme s'est terminée 1 Ce serait évidemment bien loin de la vérité. Et tout d'abord parce que Marie et Joseph, puis Jésus, puis ses apôtres, puis toute la première église de Jérusalem, celle de Actes 2:42 dont on aime se souvenir, tous étaient des juifs vivant pleinement leur judaïsme 1 A peine quelques bénéficiaires de l'effusion de la Pentecôte étaient-ils des prosélytes, c'est-à-dire-des non-juifs qui avaient adopté la foi juive. Ce n'est qu'après la Pentecôte, quand l'Eglise naissante commença à se développer parmi les populations non-juives que les problèmes commencèrent à se présenter.
Auparavant, les persécutions sous Etienne et Saül de Tarse n'étaient en fait que des problèmes internes au judaisme, les croyants en Jésus-Messie étant considérés par les autorités juives comme une secte qu'il était bon de contenir.
Par contre, par la suite, Eglise et Synagogue ayant durci leurs positions ont chacune édicté une pensée similaire qui engendra la division. Cette pensée était qu'un juif qui croyait en Jésus comme Messie n'était plus juif. La composante juive de l'Eglise fut ensuite mise en minorité dans l'Eglise. Celle-ci se situa naturellement par rapport au judaiisme, d'abord en disant: "Nous sommes aussi Israël 111 (l'Israël de la Bible et des promesses), puis: "Nous sommes le vrai Israël" et enfin: "Nous sommes le seul Israël". Par ce mouvement, l'Eglise se constitua donc en face d'Israël, en opposition avec Israël, choisissant de célébrer le dimanche au lieu du shabbat, et les fêtes chrétiennes selon un autre calendrier que le calendrier juif.
Les formulations de la foi, les déclarations liturgiques chrétiennes occultèrent ce qui était du judaisme, souvent en transférant purement et simplement ce qui était d'Israël sur le Christianisme ! Beaucoup de chrétiens ont pensé pendant des siècles qu'avant Jésus il n'y avait plus rien; que le peuple de Dieu était tombé dans la révolte et avait été rejeté; et qu'alors, Dieu avait envoyé Jésus

COMMENT REVENIR DE TELLES ERREURS GROSSIÈRES ?

Tout d'abord en revenant à la Parole de Dieu. Car rien n'est plus faux, rien n'est plus anti-scripturaire, rien n'est plus hérétique que de telles pensées i
Dieu n'a-t-Il pas fait alliance avec Son peuple ? N'a-t-Il pas affirmé que même si une mère pouvait abandonner son enfant, Lui Il n'abandonnerait pas Israël ? L'apôtre n'a-t-il pas affirmé en parlant de son peuple, de ses frères, des membres du peuple disraël, que Dieu a fait d'eux ses fils, et leur a accordé Sa présence glorieuse, a conclu Ses alliances avec eux et leur a donné la Torah, le culte, /es promesses, à eux qui sont descendants des Patriarches, ... (Romains 9:4-5)
Oui, la question est difficile: comment revenir de telles erreurs, qui portent à l'honneur de Dieu ? Car supposer que le Seigneur puisse ne pas être fidèle à Ses promesses constitue une offense majeure et porte un coup mortel à notre propre foi ! Si Dieu pouvait ne pas tenir Ses promesses à Israël, qui sommes-nous pour penser qu'il ne puisse pas en être de même à notre égard ?

A contre courant de ces hérésies, bien des déclarations officielles ont pourtant été assez loin dans le sens de la reconnaissance de la pérennité de la vocation d'Israël : ne serait-ce que cette affirmation du pape en 1980, au cours d'un voyage en Allemagne, Jean-Pôul Il a en effet parlé, et c'est extrêmement important, de "la première Alliance qui n'a jamais été révolue", petite phrase qui exclut bien toutes les théories de rejet et de substitution.

Nos Eglises ont donc publié des textes très explicites, mais ceux-ci sont encore souvent ignorés, ou passés sous silence. Des enseignements publics, par exemple, font encore la part belle à l'opposition supposée entre l'Ancienne Alliance, "dépassée", et la Nouvelle, parée des plus beaux adjectifs. C'est à nous, chrétiens de la base, à réagir vis-à-vis de tels discours, à faire appel aux textes officiels, très riches, pour les mettre en lumière, et ainsi contribuer à redresser une situation d'erreur '
Il nous faut changer de comportement, il nous faut redécouvrir les racines hébrahiques, si riches, de notre foi et en même temps, nous intéresser de plus en plus à la foi de nos frères juifs, nos "frères dinés dans la foi": nous découvrirons alors avec émerveillement quel héritage somptueux, captivant, nous avons tellement négligé, et nous serons enrichis en nous mettant à cette école qui nous permettra de mieux entrer dans les richesses de la Parole Eternelle.
Paul ne nous dit-il pas que nous sommes cette branche d'olivier sauvage qui est greffée sur le tronc ? Ne nous avertit-il pas severement de ne pas faire le fier, car ce n'est pas nous qui portons la racine, mais c'est la racine qui nous porte ? (Romains 11: 18)

QUELLE PLACE AUX JUIFS DANS L'ÉGLISE?

A l'origine, cela était dit plus haut, la scission s'est faite sur la pensée que les juifs n'avaient aucune place dans l'Eglise. A ce propos, on peut citer que des formules d'engagement baptismal, incluant l'engagement de "renoncer à la superstition et à la judéité maudite, à l'incroyance et aux ténèbres juives" (sic) et que des termes semblables ont été employés sans doute jusqu'au 19°siècle !
Revenir de ces erreurs implique donc que nous fassions à nouveau une place aux juifs au milieu de nous. Mais la question devient elle aussi bien délicate et revêt différents aspects qu'il convient de bien distinguer.

Tout d'abord, nous devrions considérer que la synagogue est partie prenante au premier chef de nos engagements spirituels, Eglise et Synagogue devraient se manifester comme étant alliées, plutôt que concurrentes, formant dans ce monde un tout suffisamment uni pour que leurs Intérêts, leur action, soient aperçus comme communs. Tendant à laver tout un passé dont nous avons à nous repentir, nous devons avoir avec le peuple juif un même langage, une même détermination: "Jamais plus cela !", En aucune façon, nous ne pouvons nier nos différences, voire nos divergences, mais encore moins nous ne devrons tolérer quelles nous détournent de notre aspiration commune: que L'Eternel nous rapproche de Lui, ce qui nous rapprochera nécessairement les uns des autres,
Nous savons que nous avons encore un long parcours devant nous, et nous ne pouvons pas savoir d'avance de quelles difficultés Il sera jalonné. Mais il importe avant tout qu'Il trouve toujours en nous la même détermination à Le servir, quoiqu'il en coûte!

En second lieu, nous ne pouvons ignorer qu'il existe des situations de frontière qu'il faudra bien assumer: des chrétiens sont attirés par le juddisme et s'approchent de la Synagogue; des juifs sont attirés. par le Christianisme et reconnaissent Jésus comme le Messie. Ces faits ne doivent pas être sous-estimés, encore moins cachés pudiquement. Ce sont des réalités que catholiques et protestants ont rencontrées dans leur cheminement respectif. Ce peut être parfois source d'amertume, de tensions. Ce ne doit pas constituer de casus belli.

La difficulté vient aussi à l'intérieur de l'Eglise. En effet, les juifs qui reconnaissent Jésus comme le Messie sont très divers: certains ont rencontré la foi chrétienne alors qu'ils étaient peut-être juifs, mais ayant perdu la foi. D'autres se disent chrétiens après un cheminement complexe et laborieux. Certains sont venus à la foi chrétienne au contact avec des églises et se sont alors tout naturellement insérés dans l'église qui les a accueillis, d'ailleurs plus ou moins facilement. D'autres disent avoir été saisis par cette foi en dehors de toute influence: il arrive alors qu'ils ne se sentent pas du tout à 'l'aise dans des églises existantes, et constituent des entités nouvelles, indépendantes et autonomes.
Quel accueil faisons-nous à tous ces groupes ? Quelle attention leur portons-nous ? Ils sont doublement en difficulté: suspects vis-à-vis du judciisme officiel qui a de sérieuses raisons de se méfier de tout ce qui est chrétien, comme il est dit plus haut, et de plus hostile à toute idée de conversion; difficilement admis dans l'Eglise ou les églises qui ont du mal à recevoir leur regard parfois très critique sur nos habitudes de vieille chrétienté.

OECUMÉNISME ET JUDAISME


A ce stade de nos réflexions, il est bien malaisé de comprendre le titre donné à cet article, titre d'ailleurs qui a été emprunté à notre cher ami, le professeur Fadiey Lovsky, dans son ouvrage "La déchirure de l'absence"
Nous avons jeté un regard sur la situation présente, pour y saisir en premier lieu quelles sont nos responsabilités, à nous chrétiens. Et la situation nous apparait comme très complexe, En quoi donc pouvons-nous comprendre qu'Israël puisse être pivot de l'oecuménisme ?
C'est pourtant une conviction qui fut déjà celle de l'Union de Prière de Charmes depuis sa fondation: l'unité des chrétiens ne pourra se faire que quand Israël se verra redonner sa place éminente aux yeux de l'Eglise. Quelles considérations ont conduit à cette déclaration ? Par quelles prolongations des lignes de l'histoire pourrions-nous imaginer une telle situation ?

Il ne s'agit aucunement de calculs ou de spéculations, mais simplement d'une attention toute particulière à la Parole de Dieu: en effet, Dieu nous annonce clairement par les prophètes qu'Il accomplira tout en son temps, et l'apôtre Paul prolonge cette vision prophétique en affirmant que Dieu, qui ne se repent pas des dons et de son appel accordés à Israël, réunira en un seul corps les enfants de Dieu dispersés, et qu'il réunit en un seul les deux peuples. Quand et comment cela se fera-t-il ? Nous ne pouvons le deviner, ni l'imaginer,
Mais ce qui est certain, c'est que notre responsabilité, à nous chrétiens, est en tous cas de tendre tous nos efforts, dans la prière comme dans l'action, dans cette direction. Ne soyons pas surpris par le Seigneur à nous opposer à son dessein. Ne nous plaçons pas en travers de Sa route.

SOYONS SENSIBLES AU SOUFFLE DE L'ESPRIT

Soyons au contraire toujours orientés vers ce dessein que Lui seul accomplira, afin d'entrer à tous moments dans les chemins qu'Il ouvrira vers ce but.
Soyons déjà conscients que nous avons hérité d'une situation désastreuse, où nous nous sentions à tort comme les privilégiés de Dieu, capables de regarder les autres comme ayant tout à recevoir de nous: nous nous croyions ainsi la racine de qui tout provenait et par qui passait la vie. Nous avons à considérer plutôt que nous ne sommes qu'une branche, venant d'un olivier sauvage. Que nous étions étrangers et n'appartenant pas au peuple choisi par Dieu, au-dehors des alliances fondées sur la promesse de Dieu à Son peuple, et donc sans espérance et sans Dieu. Mais que, par grâce, nous sommes cette branche greffée sur le tronc, nous sommes, en Jésus le Messie d'Israël, rapprochés, réunis à Son peuple pour ne faire plus qu'un dans Son amour.
     Notre responsabilité est donc d'accepter cette toute nouvelle perspective, de nous en inspirer pour toutes nos conceptions du Plan du salut de Dieu pour l'humanité.
     Notre responsabilité est d'accepter cette position, et de faire qu'elle soit de plus en plus largement acceptée dans l'église.
     Notre responsabilité est que cette humilité nouvelle de la chrétienté puisse être perçue comme suffisamment vraie, suffisamment fiable, par nos frères juifs, pour qu'ils puissent abandonner les réflexes de défense si compréhensifs acquis par des siècles de rejet de notre part, et puissent accepter d'entendre nos protestations de repentance et nos engagements d'une bonne conscience devant notre Dieu.

     C'est portés par ce mouvement-là, et en communion mystérieuse avec nos frères juifs qui attendent le Messie, que nous pourrons, nous aussi, nous préparer au mieux à la venue en gloire de Jésus-Christ, Jésus le Messie d'Israël, notre bien aimé Sauveur et Seigneur, lequel saura bien achever dans Sa parousie, l'illumination de tout le Peuple de Dieu enfin complètement et définitivement réuni dans un authentique oecuménisme. Alleluia !

                                   H. L.

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